Alain

Ghazal

Je suis un ambassadeur de la voix française via France Médias Monde

Dans la vie, la passion peut mener très loin. Tel est l'enseignement que l’on peut tirer d'une rencontre avec Alain Ghazal, l'une des voix off de la France qu'on écoute dans le monde entier sur RFI ou France 24. Son parcours hors-norme, sa personnalité attachante et son identité vocale, un subtil mélange de douceur et de virilité, font de lui une valeur sûre en séance, et il est devenu depuis longtemps un partenaire de choix pour nos équipes.
Sa voix ? Vous la connaissez : elle fait partie de votre vie, elle vous accompagne, vous rassure, vous détend, jour après jour, année après année.
Rencontre en toute intimité avec un talent aussi efficace, que discret.

INTERVIEW

Aujourd'hui ta voix fait partie de la vie de millions de français dans le monde entier, pour autant on te connaît peu, parle-nous de tes débuts.

Disons tout d’abord que l’origine de mon histoire a beaucoup influencé qui je suis devenu.
Je suis né à Beyrouth au Liban en 1971 et quatre ans plus tard la guerre éclatait.
J’étais tout petit et j’ai donc dû apprendre à grandir dans ce contexte difficile. J’allais à l’école francophone et je baignais dans la langue et la culture françaises à travers le média radio qu’était RFI, et que nous écoutions à la maison sur les grandes ondes.
À quatorze ans, passionné de radio, je créais une petite station amateur dans ma chambre, sans doute comme une échappatoire aux bombes... Ça s’appelait ‘La radio de la paix’ et on émettait juste dans le quartier mais c’était sympa, je m’exprimais dans le micro et je divertissais les gens, ça leur faisait du bien.
L’univers de la voix me fascinait tellement ! Je voulais reproduire tout ce que j’entendais ; que ce soit à la radio (je connaissais la grille de RFI par coeur) ou à la télévision lorsque je regardais les films en version originale sous-titrée. C’est aussi cet appétit ‘sonore’ qui m’a permis de devenir trilingue français, arabe et anglais.
À 16 ans j’ai été casté et recruté comme animateur par une petite radio locale, puis rapidement par une seconde, puis par une troisième qui s'appelait Magic 102 et qui me confiait carrément les matinales, et ce l’année du Bac : Sacré challenge pour rester un bon élève ! Mais contrairement aux autres, j’étais sûr de ce que je voulais faire comme métier et je savais déjà bien le faire.
Les évènements liés à la guerre m’ont poussé à quitter précipitamment le Liban pour Paris, où j’ai eu la chance de rencontrer Mme Jacqueline Joubert à Antenne 2, qui a détecté en moi une graine de « speaker ». Elle m’a fait travailler l’élocution et l’articulation devant la caméra, grâce aux fables de La Fontaine. Mais cette même année, les speakerines ont été remplacées par les bandes-annonces, et je me suis donc naturellement tourné vers ce secteur. J’ai pu passer un essai chez RFI en 1992, et à vingt ans, mon rêve est devenu réalité : je devenais l’une des voix de l’antenne.
Bref, on peut dire que la radio m’a bercé et m’a formé.

Quel déclic qui t’a poussé à te servir de ta voix comme outil de travail ? Comment a réagi ton entourage ?

En fait c’est venu naturellement à moi, la voix, je suis tombé dedans quand j’étais petit.
Pendant que les autres enfants jouaient, moi j’écoutais les ‘pros’ des radios FM françaises, ou du théâtre classique, sur des cassettes audio qu’on m’envoyait, et je reproduisais, je m’entrainais, je travaillais, je découvrais un monde fascinant, de voix, d’accents, de tons et j’en redemandais.
Je suis issu d’une famille d’artistes dans l’âme, de choristes, de musiciens, ma sœur est même chanteuse d’opéra, autant dire que La voix est une chose centrale dans ma famille, et qu’on m’a toujours encouragé dans mon choix de faire de cette passion mon métier.
Je me souviens de la fierté de mes parents quand ils m’ont entendu pour la première fois sur l’habillage de RFI depuis leur poste de radio à Beyrouth... un grand moment !
Ceci étant dit, les cours d’art dramatique et aussi l’exploration du chant lyrique à l’École Normale de Musique de Paris m’ont beaucoup aidé à me servir de mon organe et m’ont fait prendre conscience que de travailler avec ma voix était l’un des meilleurs moyens d’être en accord avec mon identité : j’ai trouvé ma voie par ma voix.

Ta voix habille France 24 (en français et en arabe), RFI et Monte Carlo Doualyia, mais aussi les locales de France Bleu et du groupe France Télévision : Donc on t’entend dans un village d’Alsace comme sur la 5ème avenue à New-York ?

Oui c’est vrai, c’est une grande fierté, et un privilège ! Je suis à mon humble niveau comme un ambassadeur de la voix française via France Médias Monde puisqu’on peut m’entendre sur tous les continents, je réalise que je vais au cœur de la vie des gens qui peuvent être dans des endroits très isolés de la planète, et c’est tout simplement incroyable. Pour France Bleu, les premières années, on m’a envoyé dans les régions françaises pour enregistrer les voix off d’habillage dans les stations locales, j’ai rencontré les techniciens, les directeurs d’antenne, les animateurs, ils m’ont appris les prononciations spécifiques de leurs régions, et m’ont pris en sympathie. Grâce à eux je suis rentré dans les foyers de France, ce fut une expérience très enrichissante. De plus, effectivement, c’est ma voix qui annonce les sommaires des soirées de France Télévisions, donc à ma façon je sers la France (sourires) et je trouve la symbolique belle pour un franco-libanais.

Médias, publicité, livres audios, films corporate, jeux vidéo.. quel est TON domaine de prédilection ?

À partir du moment où je suis en cabine tous les exercices me plaisent, et chaque type de voix présente un intérêt à enregistrer, mais j’aime particulièrement raconter des histoires sur les documentaires ou les livres audio. Ce qui est bien c’est de pouvoir élargir sa palette, d’explorer de nouveaux terrains. En ce qui concerne la voix off pub, j’ai commencé à en enregistrer très jeune, parce qu’en radio il faut savoir tout faire, alors je suis à l’aise en séance, et dans la mesure du possible j’essaie de mettre les intervenants à l’aise aussi, en faisant des propositions variées, mon but c’est que tout le monde soit satisfait. Le plus gratifiant c’est d’être choisi sur des castings importants et internationaux comme quelques marques françaises de luxe pour lesquelles je travaille.

Sonacom et Alain Ghazal  c’est une collaboration de longue date ! On va voir si tu as bonne mémoire.. Te souviens-tu de ta première séance voix off chez nous ?

Ça fait bien longtemps en effet qu’on travaille ensemble, je pense que la première collaboration avec Sonacom remonte à 1992, peu après mon arrivée en France. C’était un film institutionnel, et j’en garde un très bon souvenir.

Ta pire séance ? Ton meilleur moment ? Une anecdote ?

Ma pire séance, c’est une séance de voix-off qui avait lieu à Londres, à laquelle je suis arrivé totalement aphone, et il n’y avait rien à y faire, c’était très frustrant.
Côté bon souvenir, j’ai eu la chance de lire une anthologie de la poésie française, composée de classiques à l’usage des écoliers et j’ai vraiment adoré ça !
Une anecdote… je rêvais d’annoncer aux passagers du Concorde d’Air France à Mach 2 ‘Mesdames et Messieurs, nous venons de passer le mur du son’ et je l’ai fait !

Comment imagine-tu ton avenir professionnel ? As-tu des projets ?

J’avoue que faire des voix me laisse peu de temps pour d’autres projets, mais l’animation me manque : Une émission de radio ou de télévision sur le thème de la voix, qu’elle soit parlée, chantée ou même lyrique serait un beau projet à développer. Il y a tellement de talents méconnus à faire découvrir au public